Cameroun : La psychose du poulet gagne du terrain

(Jade Cameroun/Syfia ) Les mesures anti-grippe aviaire que le gouvernement camerounais a élaborées ont permis de circonscrire la maladie au nord du pays. Malgré les discours rassurants, les consommateurs restent sur leurs gardes.

« Le poulet local est sain. Nous, vétérinaires, invitons la population à le consommer », plaide le docteur Maurice Makek, président du Conseil national de l’ordre des vétérinaires du Cameroun à la fin d’une conférence de presse le mercredi 29 mars dans un hôtel de Douala. Joignant le geste à la parole, il déguste du poulet et des œufs, sous les caméras et les flashs des journalistes. Non sans convier les autres témoins de la scène à faire de même.
De telles séances de dégustation publique du poulet sont légion depuis qu’une psychose générale s’est installée chez les consommateurs. Et pour cause ! Dès l’annonce début février de l’arrivée de la grippe aviaire au Nigeria, pays voisin du Cameroun, les médias d’État ont diffusé des messages alarmistes du ministère de <?xml:namespace prefix = st1 ns = « urn:schemas-microsoft-com:office:smarttags » />la Santé sur les effets mortels de cette maladie. Morceaux choisis : « La grippe aviaire est à nos portes et elle tue.  Interdisons à nos enfants tout contact avec les oiseaux sauvages et domestiques ». Autant de messages qui ont contribué à créer la panique chez les consommateurs.
Psychose renforcée depuis l’annonce, le 11 mars dernier, de la présence de la maladie dans le nord du pays. Le marché du poulet, en net regain depuis l’interdiction des importations en septembre 2004 de poulets congelés, a pris un coup dans l’aile. Il est depuis lors difficile aux vendeurs d’écouler la moindre volaille contre plus d’une dizaine par jour dans le passé. Même réduits de moitié, les prix de vente des poulets et œufs de table n’ont pas inversé la tendance. L’interprofession avicole du Cameroun (IPAVIC) affirme que les éleveurs ont été obligés d’étouffer environ 1 100 000 poussins d’un jour soit une perte globale estimée à 460 millions de Fcfa (plus de 700 000 euros).
 
Un plan de lutte critiqué mais prometteur
Les autorités avaient élaboré dès l’annonce de la grippe aviaire au Nigeria un plan d’urgence prévoyant une phase d’alerte pré-épizootique et une phase épizootique. La première intégrait des mesures de prévention et de contrôle des portes d’entrées au pays et les dispositions à prendre en cas de grippe aviaire. Un dispositif qui n’aurait pas empêché les importations de volailles en provenance du Nigeria.
La seconde phase a démarré au lendemain de la découverte du premier cas dans la ville de Maroua, à l’extrême nord du pays. Des équipes de surveillance chargées d’empêcher les mouvements de volailles vers le Sud, où aucun cas n’a été déclaré, quadrillent la région. Elles passent alors au peigne fin tout véhicule qui quitte le périmètre de sécurité, non sans désinfecter ses roues. Ces équipes ont également pour mission d’attirer l’attention de la population sur les dangers que représentent désormais les élevages et le moindre oiseau mort et de lui indiquer les mesures à prendre. Des mesures parfois compromises par certains agents qui abusant de leur autorité ont été jusqu’à confisquer des poules pour d’obscures raisons. Les populations, par crainte de perdre leurs bêtes, les ont cachées dans leurs chambres à coucher. Selon le ministre de l’Élevage, Aboubakari Sarki, le gouvernement a octroyé aux fermiers des aides financières, du matériel de prélèvement, des équipements de protection individuelle, des désinfectants et des pulvérisateurs.
 
Une compensation jugée dérisoire
Plus de vingt jours après la découverte du premier cas, l’épizootie paraît circonscrite dans l’Extrême Nord où un deuxième cas de grippe aviaire a été annoncé par les autorités le 28 mars sur un canard sauvage mort. Dans le sud du pays, où aucun cas n’a été déclaré, les petits fermiers, qui élèvent moins d’une dizaine de poules, continuent de laisser divaguer leurs bêtes.
De leur côté, les grands fermiers estiment que la somme de 2 000 Fcfa (environ 3 €) d’indemnisation prévue par bête malade abattue est nettement insuffisante. « Nous avons écrit aux autorités dès la publication de ce plan de lutte pour contester cette politique unilatérale d’indemnisation qui ne tient pas compte des réalités du secteur avicole », dénonce François Djonou, secrétaire général de l’Interprofession avicole. Selon lui, la valeur d’un poulet reproducteur serait dix fois supérieure au montant proposé. La grippe aviaire n’a pas fini de faire parler d’elle au Cameroun.
 
Charles Nforgang
 
 
 
 

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