Mobilisée contre la réforme constitutionnelle proposée par le pouvoir en septembre dernier, l’opposition proche de Jean Ping, dépourvue de moyens, a assisté, impuissante, au vote du texte sans grandes modifications par les deux chambres réunies.
Mobilisée contre la réforme constitutionnelle proposée par le pouvoir en septembre dernier, l’opposition proche de Jean Ping, dépourvue de moyens, a assisté, impuissante, au vote du texte sans grandes modifications par les deux chambres réunies.
Sur 213 votants, 197 voix pour, 14 contre et 2 abstentions.
Un vrai revers pour la Coalition de l’opposition pour la nouvelle république, qui avait fait du projet d’amendement constitutionnel proposé par le gouvernement, son cheval de bataille. Peine perdue.
En effet, faute de mobilisation sur le terrain, ultra minoritaire au parlement, l’opposition radicale réunie autour de Jean Ping n’a pu stopper les plans du pouvoir d’Ali Bongo, décidé à faire passer à tout prix, son projet de modification constitutionnelle. Et à tourner définitivement la page douloureuse de la présidentielle d’août 2016.
Après le passage du texte à l’Assemblée nationale en décembre dernier, l’opposition espérait au moins son blocage au Sénat. Mal lui en prit quand la Chambre haute du parlement a, elle aussi, adopté le projet sans grand changement de la mouture proposée par le gouvernement. Puisque les passages querellés, eux, restent quasiment intacts.
Points querellés
Si les élections législatives et présidentielles passent désormais à deux tours, la durée même des mandats présidentiels reste indéfinie, 7 ans renouvelable autant de fois. Idem pour la prestation de serment devant le président de la république des ministres et autres cadres nommés à des hautes fonctions. Même chose pour le passage du régime semi présidentiel (ancienne constitution) à un régime présidentiel (nouvelle constitution).
Désormais, le président de la république est à lui seul le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des accords et traités. Il détermine la politique de la nation (l’ancienne constitution disposait que le président de la république détermine la politique de la nation en concertation avec le premier ministre). Il est le détenteur suprême du pouvoir exécutif (l’ancienne loi disposait que le président de la république est le détenteur suprême du pouvoir exécutif qu’il partage avec le premier ministre).
Une opposition en difficulté
Le premier à avoir sonné l’alarme contre une constitution visant à faire du Gabon « une monarchie sous le paravent constitutionnel » est sans doute le premier vice-président du Sénat, Jean Christophe Owono Nguema. Sur les antennes de TV5 Monde, il avait appelé l’ensemble des Gabonais à descendre dans la rue pour faire échec à cette réforme constitutionnelle, mais aussi pour chasser Ali Bongo du pouvoir.
D’autres opposants, à l’exemple de Zacharie Myboto, le président de l’union nationale, l’ancien premier ministre d’Omar Bongo, Jean Eyeghe Ndong, Jean Ping, ont tous appelé le peuple à empêcher la « monarchisation » ou la « liquidation » du pays. Sans succès. Puisque la mobilisation des jeunes devant l’Assemblée nationale, en décembre dernier, n’aura mobilisé qu’une dizaine de manifestants à peine.
De la radicalisation à la marginalisationPour le pouvoir qui savoure la victoire d’une nouvelle ère, l’adoption de cette modification constitutionnelle était le dernier acte du chantier de reconstruction politique, après une présidentielle clouée au pilori par la communauté nationale et internationale. Et le dialogue national dont est issue cette nouvelle constitution, aura été le centre de décisions de ce nouvel environnement politique et juridique. Ayant décidé de boycotter les négociations, dépourvue de majorité au parlement, faute de mobilisation sur le terrain, l’opposition dite radicale se trouve désormais comme au bord du débat politique. Et avec cet échec de la bataille constitutionnelle, elle paie en quelque sorte le prix de sa radicalisation politique.
Emmanuela MAKEGHELE