Le dialogue politique d’Ali Bongo. Un appel qui semble résonner dans le désert

Après sa réélection très contestée à la présidentielle, Ali Bongo Ondimba, conscient du clivage du pays, appelle ses adversaires au dialogue. Certains y voient une absolue nécessité pour ressouder une nation meurtrie, d’autres dénoncent une tentative désespérée d’un président isolé.

Après sa réélection très contestée à la présidentielle, Ali Bongo Ondimba, conscient du clivage du pays, appelle ses adversaires au dialogue. Certains y voient une absolue nécessité pour ressouder une nation meurtrie, d’autres dénoncent une tentative désespérée d’un président isolé.

« Le score de cette victoire signifie qu’il y a de nombreux électeurs, pour des raisons et d’autres, qui n’ont pas choisi notre projet. Il nous faut donc décrypter, entendre et comprendre leur message (…) J’entends réunir très rapidement les conditions d’un dialogue politique ouvert à tous ceux qui le voudront. J’appelle donc tous les responsables politiques, y compris les candidats malheureux de la présidentielle du 27 août dernier à travailler avec moi, dans le respect de nos différences certes, mais animés de la volonté de situer l’intérêt supérieur de la nation au dessus de nos intérêts particuliers et partisans ». Ainsi s’est exprimé Ali Bongo Ondimba à la suite de la confirmation de sa réélection très contestée par la Cour Constitutionnelle, le 23 septembre dernier.

Selon les chiffres communiqués par la plus haute juridiction du pays au terme du contentieux électoral, Ali Bongo recueille 50,66% contre 46,14% pour son principal rival, Jean Ping. Soit un écart d’à peine 11 000 voix séparant les deux hommes. Ce score médiocre pose à Ali Bongo Ondimba, qui a longtemps récusé toute idée d’un Gabon en crise, un dilemme : peut-il gouverner dans un tel climat de défiance, de haine et de fracture sociale ? D’autant plus que les réactions de la communauté internationale sur sa réélection sont d’une froideur inédite. D’où l’invite au dialogue du Président de la République, dans le but de cueillir quelques opposants malheureux à la dernière présidentielle pour faire partie de son prochain gouvernement. Ce qui pourrait lui garantir une certaine légitimité qui, pour l’instant, semble lui manquer. Format du dialogue Vu sous cet angle de la simple distribution des portefeuilles, le dialogue ne sera qu’une simple mangeoire de plus, comme il en a toujours été dans notre pays pour ce genre de retrouvailles.

Le dialogue politique, pour être dialogue, devra intégrer toutes les questions qui fâchent, et qui ont constitué le cocktail explosif du grabuge postélectoral ayant marqué la réélection du Président de la République. Le dialogue national devra donc élaguer tous les tabous qui font ombrage à l’alternance politique au Gabon tels que le scrutin à deux tours, la limitation à deux des mandats présidentiels, etc. C’est là que le bât blesse, et il revient aujourd’hui au camp présidentiel de lever tous les blocus à ce sujet, comme l’avait promis Ali Bongo lui-même, lors de son passage devant les deux chambres du parlement. Le Chef de l’exécutif avait alors déclaré qu’il était « prêt à discuter de tout, y compris des mandats politiques ». Voilà l’impératif qui devra figurer en première place au menu du dialogue auquel tient désormais Ali Bongo Ondimba.

L’opposition divisée

Un impératif destiné à réconcilier un pays divisé pour certains; un cadeau empoisonné en direction de l’opposition pour d’autres; etc. Bref, les réactions qui fusent depuis cette invitation au dialogue, achèvent de creuser le clivage abyssal, qui divise le pays à la suite de la réélection du Chef de l’Etat. Comme d’habitude, l’opposition est divisée. D’un côté, les modérés parmi lesquels les « petits candidats » malheureux comme Bruno Ben Moubamba ; Dieudonné Minlama Mitongo et autres candidats dits de « témoignage ». Depuis le terme du scrutin ces derniers ne cessent d’envoyer des signes de rapprochement avec Ali Bongo. On sait déjà qu’ils accepteront sans barguigner tous les mets qui leur seront servis. A la seule exception de Pierre Claver Maganga Moussavou. Arrivé troisième à la présidentielle, le président du Parti Social Démocrate, se dit prêt à discuter, à condition que la discussion porte sur le redécoupage administratif, l’élection à deux tours, la limitation des mandats et toutes les autres questions néfastes à l’expression démocratique dans notre pays.

Pour ces opposants modérés, le dialogue apparaît aujourd’hui comme une nécessité absolue pour panser les plaies d’un pays meurtri. Composée essentiellement des radicaux regroupés autour de Jean Ping, comme l’ancien patron de l’Assemblée nationale, Guy Nzouba Ndama, l’aile dure de l’opposition refuse, quant à elle, de participer au dialogue convoqué par Ali Bongo Ondimba. Pour l’ancien président de la commission de l’Union Africaine, Jean Ping qui continue à se revendiquer comme le président légitimement élu des Gabonais, si dialogue il y a, celui-ci ne doit être convoqué que par un président démocratiquement élu. Même si dialogue politique il devrait y avoir, ce serait certainement sans le camp de Jean Ping. Ce bras de fer est loin de pacifier le climat, et laisse déjà planer l’idée d’un mandat difficile pour Ali Bongo Ondimba, qui semble prêcher dans le désert tant que l’amertume d’une « élection volée » continuera à hanter les pro-Ping.

Charles Nestor Nkany

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