Des opposants dorment debout sous la pluie

Torture des détenus politiques

53 militants du Mouvement pour la renaissance du Cameroun et 4 militants du Cameroon people’s party passent les nuits debout dans leur cellule puante qui laisse couler de l’eau partout depuis plus de deux semaines à la prison centrale de Douala. Ils ont fait une pétition pour demander au régisseur de changer de cellule. Une demande refusée.

Cette journée pluvieuse du vendredi 20 Août 2021 se déroule comme toutes les autres pour Etienne Ntsama, Tehle Membou, Mira Angoung et Moussa Bello, militants du Cameroon people’s party (cpp) interpellés le 18 septembre 2020 à la sortie d’une réunion et détenus à la prison centrale de Douala. Accompagnés des 53 autres prisonniers politiques du mouvement pour la renaissance du Cameroun (mrc), arrêtés dans les mêmes circonstances, à la même date,  avec qui ils  partagent la même cellule, ils ont une nouvelle fois passé de sales moments. Ils sont tous accusés de conspiration, d’insurrection et de révolution.

Détention inhumaine

Ce qui leur sert de couchette est une dalle usée qui laisse ruisseler abondamment de l’eau à l’intérieur de la cellule, de fortes pluies s’abattant depuis un mois sur la ville de Douala. Comme ils dorment sur des matelas à même le sol, tout est mouillé jusqu’aux vêtements. Ils passent toute la nuit debout car la salle est inondée. Leurs demandes de changer de cellule auprès du régisseur sont restées vaines. Ce dernier faisant la sourde d’oreille. Cette situation catastrophique affecte déjà la santé de plusieurs de ces prisonniers politiques, qui souffrent notamment de maladies de la peau et sont dans un état de santé critique.

Dans cette minuscule cellule qui jouxte les toilettes, les 57 détenus cohabitent, leurs maigres affaires accrochées à des clous plantés dans les murs noirs de crasse. Que certains soient malades et contagieux, peu importe. « La prison est bondée et aucune pièce n’est disponible pour isoler les malades », explique certaines sources de la prison. 

Une pétition rejetée

Selon leur avocat, les militants du Mrc ont fait une pétition il y a deux semaines, adressée au régisseur de la prison Pombouo Fopa  Thiery. Ils disent craindre pour leur vie. Leur survie dépend du régisseur. Tout en condamnant la situation dans laquelle ils se trouvent, ils précisent qu’ils ont demandé depuis plusieurs semaines d’être placés dans un cadre plus agréable sans succès. Et s’inquiètent de ce silence car leur santé ne cesse de se dégrader, avec des nuits sans sommeil.   

Durcissement pour des raisons politiques

Bien que le régisseur ait démontré sa bonne foi en se montrant ouvert à tout échange sur le sujet, les critiques fusent de partout dans les deux formations politiques. Pour le Dr Sosthène Médard Lipot, porte-parole du Mrc, il y a plus de 150 militants et sympathisants de son parti arbitrairement arrêtés dans le cadre des marches pacifiques du 22 septembre 2020 et répartis dans diverses prisons du pays. Ces marcheurs pacifiques revendiquaient la fin de la guerre dans les deux régions anglophones, la libération de toutes les personnes arrêtées ou condamnées dans le cadre de la crise anglophone, la tenue d’un vrai dialogue inclusif, la réforme du système électoral. Le parti trouve inadmissible que ces « otages politiques de Biya et de sa bande » soient torturés en prison. « Car leurs revendications sont légitimes, ayant pour but de libérer tout un peuple »

Edith Kah Walla la présidente du cpp condamne les conditions de détention de 4 membres du mouvement Stand up for Cameroon. Sur sa page Facebook, en plus de condamner ces conditions atroces de détention, elle condamne aussi le fait que l’affaire soit jugée devant un tribunal militaire. « Lors de la dernière audience du 9 juin, mes 4 militants ont été renvoyés injustement en prison parce que le ministère public incarné par le commissaire du gouvernement a indiqué ne pas être prêt . Autant d’injustice pour des personnes en prison depuis plus de 8 mois » a-t-elle précisé.

Injustice

Maitre Kegne, avocat des détenus mrc, dénonce aussi le fait que le tribunal militaire soit désigné pour juger ces militants arrêtés lors des marches blanches. Pour lui, c’est une violation grave du code pénal camerounais.

Revenant sur le cas de détentions inhumaines observées à la prison de Douala, il affirme qu’on est en face des violations des règles minimales de détention. « L’Etat a l’obligation de s’occuper convenablement des détenus. Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au logement des détenus pendant la nuit, doivent répondre aux exigences de l’hygiène, compte tenu du climat, tous les locaux fréquentés régulièrement par les détenus doivent être maintenus en parfait état d’entretien et de propreté », précise l’avocat.

Il explique qu’une procédure est en train d’être mise sur pied pour faire pression sur l’administration pénitentiaire, puisque le régisseur refuse toujours de trouver des cellules confortables aux détenus politiques, en violation de la charte africaine des droits de l’homme. 

Hugo Tatchuam (Jade)

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