Objet de tous les fantasmes politiques entre les camps Jean Ping et Ali Bongo Ondimba, depuis le terme de la dernière présidentielle, le rapport final des observateurs de l’Union Européenne est finalement tombé le 12 décembre. En forme de réquisitoire contre la réélection d’Ali Bongo Ondimba.
Objet de tous les fantasmes politiques entre les camps Jean Ping et Ali Bongo Ondimba, depuis le terme de la dernière présidentielle, le rapport final des observateurs de l’Union Européenne est finalement tombé le 12 décembre. En forme de réquisitoire contre la réélection d’Ali Bongo Ondimba.
Le rapport définitif devrait être le dernier acte de la bataille présidentielle qui oppose Ali Bongo Ondimba à son ex-beau-frère, Jean Ping, depuis le terme du scrutin présidentiel du 27 août dernier. Et comme on s’y attendait déjà, derrière l’euphémisme diplomatique «ces anomalies mettent en question l’intégrité du résultat final de l’élection», c’est un vrai réquisitoire, sans concession que les observateurs de l’Union Européenne adressent contre la réélection d’Ali Bongo Ondimba. Une réélection qui pour la mission de l’UE ne reflète pas la réalité du scrutin tel qu’elle a été constatée par ses 70 observateurs déployés à travers quelques circonscriptions électorales.
Les anomalies du Haut-Ogooué
En clair, les observateurs pointent un doigt accusateur sur le système particulièrement «opaque» qui a régi toute la consolidation des résultats de l’élection. Surtout ceux de la province du Haut-Ogooué, fief natal d’Ali Bongo, à l’origine de cette réélection controversée du président sortant. On peut y lire : « Le nombre d’abstentions et des bulletins blancs et nuls dans une seule des 15 commissions électorales locales de cette province est supérieur à celles annoncées par l’ensemble des 15 commissions électorales locales de la province ». Un constat, qui selon ledit rapport « remet en question l’intégrité du processus de consolidation des résultats et du résultat final de l’élection.”
Un rapport qui ne surprend nullement, car quelques jours seulement après le scrutin, la Chef de la mission d’observation de l’UE, Mariya Gabriel avait déjà regretté “d’évidentes anomalies ” dans les résultats de la province du Haut-Ogooué, à l’origine de la réélection de l’actuel Chef de l’Etat.
Jean Ping: “Excellent rapport”
« Un excellent rapport », selon l’opposant Jean Ping pour qui, le constat de l’Union Européenne ne fait que confirmer ce qu’il a toujours déclaré sur cette élection. « Il démontre de manière incontestable que c’est moi, Jean Ping, qui suis le vrai vainqueur de l’élection présidentielle ». A dit l’ancien président de la commission de l’Union Africaine, qui attend désormais de la communauté internationale qu’elle prenne de sanctions ciblées contre le pouvoir de son rival, afin de le punir pour son « coup d’Etat militaro-électoral ». Des sanctions que la mission de l’UE dit ne pas être habilitée à prendre. Pour les observateurs, si sanctions il y aura, celles-ci ne seront prises qu’à l’appréciation de chaque Etat membre de l’Union Européenne.
Même si l’opposant ne donne pas de consigne claire quant aux manifestations de la rue, il ajoute néanmoins avec ambiguïté : « pour notre part, chaque Gabonaise et chaque Gabonais doit savoir que désormais notre destin est entre nos mains. Plus que jamais, la libération de notre pays est entre nos mains ». Rejet du ministre de la Communication
« Un rapport incomplet et déséquilibré », dénonce le Ministre de la communication, par ailleurs porte-parole du gouvernement, Alain Claude Billie By-Nez, lors de sa traditionnelle conférence de presse diffusée sur les antennes de Gabon Télévision, la télévision nationale. Pour Alain Claude, qui doute de la fiabilité du rapport de l’UE, il est clair que les observateurs, qui n’ont travaillé que sur 10% des bureaux de vote ont fait montre d’une partialité en faveur du camp de Jean Ping. Car, poursuit-il, le fait même de concentrer leur attention sur les résultats de la seule province du Haut-Ogooué, qui d’ordinaire vote à plus de 90% pour le parti au pouvoir, alors que dans la région natale de Jean Ping à Omboué et un peu partout, on constate des procès verbaux surchargés, avec des scores dépassant 100%, cela prouve largement que le rapport présenté par la mission de l’UE comporte des anomalies auxquelles le gouvernement donnera suite en temps opportun.
Et revoilà “la Françafrique “ Pour Pascal Nkoulou, le président du Bloc démocratique populaire (BDP), un parti proche du pouvoir gabonais, l’»acharnement» des observateurs de l’UE sur la réélection d’Ali Bongo, n’est ni plus ni moins qu’un complot de la Françafrique ourdi par l’Occident, la France en tête. Pour joindre l’acte à la parole, le leader du BDP a manifesté, avec quelques partisans acquis à sa cause devant la représentation diplomatique française au Gabon, tandis que les observateurs de l’Union Européenne déroulaient leur rapport. Pour Pascal Nkoulou, il est clair que la mission de l’Union Européenne a outrepassé les termes de la convention qu’elle a signée avec l’Etat gabonais, dans le cadre de l’observation électorale pour laquelle elle est venue au Gabon. Un coup sans doute ourdi par la tutelle coloniale française, qui cherche à se substituer aux institutions de la république gabonaise. Des accusations fondées ou non, toujours est-il que la publication du rapport de la mission européenne sonne désormais comme le dernier acte d’un contentieux électoral, qui fera date dans l’histoire des élections présidentielles au Gabon.
Charles Nestor Nkany