A l’aéroport de Douala, les touristes qui portent des objets de l’artisanat local sont pour la plupart arnaqués par des fonctionnaires de la Douane ou du ministère des Forêts et de la Faune. Cette situation a porté un coup dur au commerce des produits artisanaux du Cameroun.
A l’aéroport de Douala, les touristes qui portent des objets de l’artisanat local sont pour la plupart arnaqués par des fonctionnaires de la Douane ou du ministère des Forêts et de la Faune. Cette situation a porté un coup dur au commerce des produits artisanaux du Cameroun.
Allemande d’origine camerounaise, Barbara, qui visite quatre fois par an le Cameroun avec de nombreux touristes allemands, n’en peut plus. « Pour peu qu’un visiteur souhaite sortir avec le moindre objet d’art, les hommes en tenue lui taxe des impôts terribles à payer. Cela n’encourage plus à partir du Cameroun avec des souvenirs », se plaint-elle. Suite à un reportage télévisé diffusé sur le sujet en décembre dernier, le phénomène a baissé d’intensité, sans pourtant s’arrêter. Depuis lors, « les policiers camouflent leurs gestes et se montrent prudents. Mais ils n’ont pas abandonné le dépouillement des touristes», constate Aboubakar Sidik, un artisan.
Urlich Fokit, chef de poste forestier à l’aéroport de Douala, a plutôt une autre explication : « Nous déployons des équipes pour limiter des abus en matières de pillage des objets tirés de notre patrimoine culturel». Il reconnaît toutefois « qu’on observe des abus. Mais nous plaidons pour la sanction des fonctionnaires véreux ou de tout coupable de trafic illicite des objets d’art. »
Le commerce d’objets d’art en chute
Informés de ces difficultés, les touristes hésitent à acheter des objets d’art de souvenir, pour éviter les désagréments à l’aéroport sur le chemin de retour. Résultat, de jour en jour, le « marché des fleurs », lieu où se concentre le commerce des objets d’art à Douala, voit sa clientèle se fondre. Ndam Zak, vendeur d’objets d’art, en est fort dépité. «A l’aéroport, dès qu’un touriste se présente avec un petit objet d’art sans valeur, on lui demande de payer sans aucun reçu une forte somme d’argent. Des montants qui ne sont prévus nulle part dans la procédure. Et s’ils ne payent pas, les objets sont confisqués», dénonce-t-il. Pour ce commerçant, à la douane, les agents demandent des papiers imaginaires pour extorquer de l’argent aux touristes. «Pour faire passer une petite statue, ils taxent arbitrairement. Le touriste pressé abandonne et s’en va », ajoute-t-il.
Mohamadou, Président de l’association des artisans, indique que «cette corruption à l’aéroport a commencé l’année dernière. Avant on n’avait pas ça. Ce sont les artisans locaux qui souffrent », fait-il remarquer Mohamadou en montrant les décharges des lettres de dénonciation qu’ils ont déposées à la délégation régionale du tourisme pour le littoral et chez le gouverneur.
Concussion
A la délégation des forêts et de la faune du Littoral, Ombolo Tassi Engels explique qu’au niveau de l’aéroport, la loi prescrit de laisser passer le touriste en possession d’un ou de deux objets d’arts. «Mais quand les quantités sont importantes, la personne qui les transporte doit passer par le fret et payer une certaine somme d’argent. Quand c’est l’ébène en grande quantité, le commerçant doit délivrer au touriste une copie du titre d’exploitation, pour attester à l’aéroport, de l’origine légale du bois», explique le fonctionnaire. Il reconnaît néanmoins qu’au niveau de l’aéroport, ses éléments ne respectent pas toujours la loi. A l’aéroport de Douala, le Chef de brigade touristique Laida Geremy indique que ses agents ne saisissent pas les objets d’art, mais s’assurent plutôt que ceux-ci ne contiennent pas des métaux. L’avocat Me Natchou Tchoumi soutient que les fonctionnaires de la douane et du ministère des Eaux et forêts incriminés doivent être poursuivis pour concussion. Un délit que le Code pénal définit comme la perception ou la réclamation par tout fonctionnaire d’une taxe ou d’un impôt qui ne lui est pas dû.
Guy Modeste DZUDIE et Hugo TATCHAM (JADE)
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