Homosexualité au Cameroun : Passions et répressions

(Jade Cameroun/Syfia) En dépit des interventions courageuses de ses défenseurs, l’homosexualité, punie par la loi, est toujours considérée au Cameroun comme une dangereuse perversion. Surtout depuis la publication fin janvier d’une liste de personnalités présumées homosexuelles.

« Comme la polygamie en France, disons non à l’homosexualité au Cameroun ! »; « Un gars me touche, je le tue ! ». Les pancartes brandies par le public qui assistait le 9 mai à une conférence organisée au Centre culturel français (CCF) de Douala par l’Association de défense des droits des homosexuels (Adefho), sur le thème « L’homosexualité, perversion ou nature sexuelle : la répression est-elle la réponse ? » étaient sans équivoque.


En ouvrant les débats, Bruno Essard Budail, un responsable du CCF, s’est dit « choqué par la marginalisation des homosexuels au Cameroun ». Me Alice Nkom, avocate et présidente de l’Adefho, est allée dans le même sens. Pour elle, « l’homosexualité est une nature. Les personnes qui ont cette identité ne doivent pas être rejetées. Il s’agit du respect des droits de l’homme et de la diversité humaine« . Me Michèle Mpacko, avocate, est du même avis : « Refuser d’avoir les mêmes références sexuelles que l’autre est aussi banal qu’aimer le chocolat ou préférer le beurre ».


Mais pour la grande majorité des Camerounais, l’homosexualité reste un vice, une contre-valeur d’importation occidentale. « Nous ne la tolérerons jamais au Cameroun ! », résume Banda Kani, homme politique, très applaudi durant la conférence. « Il s’agit, estime-t-il, d’organiser la désintégration culturelle de nos sociétés, de créer artificiellement de nouvelles classes sociales afin d’aggraver les oppositions et les divisions africaines, pour justifier de nouvelles missions civilisatrices ».


Depuis la publication fin janvier par certains journaux d’une liste de 50 personnalités présumées homosexuelles, l’hostilité contre cette « perversion » s’est renforcée. Lors d’un débat à Yaoundé début février, Suzanne Kala Lobe, journaliste qui a appelé au respect du droit des homosexuels à la différence, a été publiquement huée. Peu après, Me Alice Nkom a été brutalisée à Yaoundé quand elle a demandé au tribunal la libération d’homosexuels détenus sans jugement. L’avocate est par ailleurs régulièrement harcelée au téléphone par des anti-homosexuels jugeant ses prises de position de l’ordre du « sacrilège ».


 


Moyen d’accéder au pouvoir


En fait, comme l’explique, le Dr Jean-Louis Jon, neuropsychiatre et sexologue, depuis la publication des fameuses listes, l’homosexualité n’apparaît pas seulement comme une dépravation mais aussi comme un moyen d’accéder au pouvoir : « Les Camerounais se sont rendus compte que ce sont les noms de la minorité qui détient le pouvoir et la fortune nationale qui se retrouvent sur des listes d’homosexuels ». Et les journaux ont présenté l’homosexualité comme une condition d’accès aux postes à responsabilités. « Du coup, les gens la perçoivent comme la cause de leurs misères, puisque l’essentiel des jeunes est au chômage« , conclut-il.


Les homosexuels camerounais contraints à la discrétion, n’hésitent cependant plus à témoigner. A 42 ans, Elodie, cadre d’assurances, vit avec une femme après une déception sentimentale avec un homme. « Nous avons un grand rôle à jouer dans l’évolution des mentalités, estime-t-elle. Ce n’est plus le moment de se cacher ! ». Serge, lui, affirme qu’il n’a « jamais essayé avec une fille. C’est comme si j’étais né avec : je n’y peux rien. ». Lui et son compagnon s’étonnent du « radicalisme des Camerounais », « de leur fanatisme aveuglant« .


 


Pratique illégale et immorale


De fait, ils continuent à avoir la loi contre eux. L’article 347 bis du Code pénal condamne d’une peine de 6 mois à 5 ans d’emprisonnement et d’une amende de 20 000 Fcfa (31 Euros) à 200 000 Fcfa (310 Euros) toute personne « qui a des rapports sexuels avec une personne de même sexe ». Onze jeunes soupçonnés d’homosexualité sont ainsi détenus depuis septembre 2005 à la prison centrale de Yaoundé. Le procureur a requis l’expertise d’un médecin pour établir des preuves de sodomie. Quatre filles, dont une mineure de 15 ans, sont emprisonnées à Douala pour les mêmes raisons. Le 13 mars, onze élèves ont été exclus d’un collège de Douala pour pratiques homosexuelles.


Pour Me Alice Nkom, il s’agit d’une violation de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du Pacte international des droits humains. « Dès que le fonctionnement du Conseil constitutionnel sera effectif, je le saisirais pour qu’il annule cette disposition », martèle Me Michèle Mpacko. Une position que ne partagent pas les ministres cités dans la liste des homosexuels. En clamant leur innocence, ces derniers ont affirmé leur volonté de se démarquer de ceux qui s’adonnent selon eux à une pratique immorale.


 


Alexandre T. Djimeli

One Reply to “”

  1. la repression de lla repression de l’homosexualité n’est-elle pas exagérée?n’est-ce ps une atteinte à un droit personnel s’il ya consentement entre les parties? cette pratique est certes contraires aux moeurs camerounaises mais je pense que d’autres solutions doivent être envisagées.merci.

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